Budget 2015

Pourquoi l’équation budgétaire de 2015 est insoluble :
 
1. Parce que l’effet base 2014 est trop important :
Pour mémoire, la LPFP 2012-2017, votée il y a moins de deux ans, prévoyait un déficit public à -2,2% du PIB en 2014. Tout indique, aujourd’hui, que celui-ci pourrait être doublé et atteindre -4,4% du PIB (environ 90Md€), sous l’effet conjugué de plusieurs facteurs :
- des recettes toujours surestimées et doublement minées à la fois par la faiblesse de l’inflation et de la croissance ;
L’exemple de l’impôt sur le revenu est le plus parlant. Alors que son rendement était de 67Md€ en 2013 (exécuté), il a été prévu à 74,4Md€ en LFI 2014, puis été révisé à la baisse de 3,2Md€ à l’occasion du PLFR 2014 (1). Pour autant, il y a de fortes probabilités pour que le Gouvernement soit contraint à une nouvelle révision à la baisse de ce montant, notamment en raison du coût de la mesure ponctuelle de réduction d’impôt pour les bas revenus (1,3Md€) ainsi que des stratégies – actives ou passives – d’évitement de l’impôt.
- de nouvelles dépenses fiscales ont été annoncées par le Gouvernement, celles-ci auront un impact sur le solde public de 2014 dans la mesure où elles sont rétroactives au 1er septembre 2014 ;
Le Gouvernement a ainsi décidé, dans le cadre de son plan logement, d’élargir le Crédit d’Impôt Développement Durable (CIDD). Le crédit d’impôt serait porté à 30%, sans conditions de ressources, dans la limite de 4 800€ pour un couple (16 000€ de dépenses éligibles). Or, il convient de rappeler que cette dépense fiscale était rapidement devenue hors de contrôle, avant sa réforme en loi de finances pour 2012.
- la progression des dépenses sociales, en dépit de la moindre inflation, comme le montre la revalorisation de 2% du RSA socle.
 
2. Parce qu’en 2015 les baisses de recettes annoncées sont considérables et que les efforts en matière d’économies ne seront pas au rendez-vous :
- les mesures « entreprises » (baisse de la C3S et baisse des charges patronales notamment) prévues par le Pacte de responsabilité vont peser à hauteur de 6,5Md€ sur les comptes publics, hors CICE (évalué pour 2015 à 13,1Md€) ;
- les mesures « ménages » elles aussi prévues par le Pacte (réforme du bas de barème de l’IRPP et fusion RSA/PPE), ont un coût prévisionnel de 5Md€. De ce point de vue, il est à craindre que la fusion PPE/RSA n’ait un coût important en trésorerie du fait du décalage en n+1 du versement de la PPE ;
- par ailleurs, le Gouvernement, par la voix de Michel SAPIN, a annoncé que les économies sur le budget de l’Etat seraient moindres que prévu en 2015 (initialement 21Md€) « du fait de la faiblesse de l’inflation » ;
En réalité, il faut distinguer là deux phénomènes : 
o certes, la faiblesse de l’inflation (0,5%) diminue mécaniquement le rendement des mesures de gels de prestations comme les pensions et desserre la contrainte qui pèse sur les crédits ministériels ; 
o mais elle ne saurait justifier la diminution des économies prévues. Ainsi, il est à craindre que la marge d’économies budgétaires dégagées sur la charge d’intérêts de la dette ne soit gommée par le ralentissement de cet effort. 
- enfin, le Gouvernement a annoncé de nouvelles dépenses, à l’instar de la garantie des logements étudiants ou de l’« aide au répit » dans le cadre du PJL vieillissement (500€/an) + revalorisation des plafonds de l’APA.
 
Conclusion
Si l’on considère les années 2014 et 2015, il apparaît que la trajectoire d’ajustement retenue par le Gouvernement ne permettra pas, en cas de croissance du PIB inférieure de ½ point aux prévisions (1,0% en 2014 et 1,7% en 2015), de faire revenir le déficit effectif en deçà de 3 % du PIB en 2015, conformément à nos engagements européens.
 
Pire encore, même si le Gouvernement parvenait à contenir la progression de la dépense publique à 1 ¼ % par an en volume entre 2014 et 2017 (contre 1,5% entre 2007 et 2013), le déficit effectif ne passerait en-dessous de 4 % du PIB qu’en 2017, et ne reviendrait donc pas en deçà du seuil de 3 % du PIB en application du Pacte de stabilité et de croissance (PSC). En outre, la dette publique augmenterait continûment pour atteindre 100 % du PIB en 2015.
 
Or, toutes les conditions sont aujourd’hui réunies pour que la croissance des dépenses publiques ne subisse pas l’inflexion initialement envisagée par le Gouvernement (0,3% en 2014 ; -0,3% en 2015 ; 0,3% en 2016 et 0,2% en 2017), rendant de fait ce scénario crédible.
 
Note de Gilles CARREZ Président de la Commission 
 
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